(Par Marion HENRY, aux Rencontres de La Baule)
LA BAULE (Loire-Atlantique), 4 septembre 2017 (APMnews) - La ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, a présenté vendredi les trois principaux axes de la nouvelle stratégie nationale de santé (SNS), pour laquelle une concertation devrait être lancée dans le courant du mois en vue d'une élaboration d'ici la fin de l'année.
Elle s’est exprimée en clôture de la deuxième journée des Rencontres de La Baule, intitulées "la médecine libérale au sein du nouveau système de santé" et organisées par la conférence nationale des unions régionales des professionnels de santé (URPS) médecins libéraux. A l'issue de son intervention, elle a longuement répondu aux questions des médecins dans la salle, puis dans un second temps aux journalistes lors d’une conférence de presse.
Mercredi en conseil des ministres, la ministre a détaillé les sept objectifs de la "stratégie de prévention en santé" et annoncé la réunion courant novembre d’un comité interministériel pour la santé (cf
dépêche du 30/08/2017 à 16:23).
Vendredi, Agnès Buzyn a d’abord estimé que les médecins libéraux avaient un "rôle fondamental à jouer" dans la SNS, puis a présenté trois axes pour construire cette nouvelle stratégie.
D’abord, il faut "relancer une vraie politique de prévention dans notre pays", a-t-elle estimé, rappelant sa présentation en conseil des ministres 48 heures plus tôt.
Elle a indiqué que, sur ce sujet, le rôle des médecins libéraux était "totalement primordial". "Alors, comment rémunérer tout cela?", a-t-elle poursuivi. "Dans le cadre d’accords conventionnels, nous poursuivrons le travail que vous faites avec l’assurance maladie pour développer des dispositifs qui permettent de renforcer votre implication autour de rémunérations incitatives, que ce soit sur des objectifs de santé publiques, mais cela peut être d’autres méthodes incitatives", a-t-elle indiqué.
"Est-ce qu’il faut des consultations dédiées? Pour quelles populations?", s'est-elle interrogée, citant par exemple des consultations consacrées à l’adolescence ou l’éducation sur certaines maladies sexuellement transmissibles. "On peut tout imaginer. Je pense qu’il est nécessaire qu’on reconnaisse le temps de cette éducation à la santé", a-t-elle affirmé.
"La priorité ne doit plus être la revalorisation de l’acte. Il faut faire évoluer les modes de rémunération en y introduisant certaines notions sur la qualité, la prévention ou la pertinence des soins", a ajouté la ministre. "Certains dispositifs favoriseront également l’accompagnement des maladies chroniques, les actions de vaccinations [...] et de dépistage [...] avec une attention particulière pour les publics précaires et les enfants".
En complément des leviers conventionnels, "nous travaillerons ensemble à des outils", notamment d’information "afin que cela puisse être intégré à votre pratique quotidienne", a-t-elle indiqué aux médecins.
Un système mieux organisé au niveau du territoire et centré sur le patient
Le deuxième axe consistera à passer" d’un système en silo à un système mieux organisé au niveau du territoire, et bien centré sur les besoins et les vécus des patients", a poursuivi la ministre, précisant qu'il porterait sur la "lutte contre les inégalités sociales et territoriales d’accès à une offre de santé de qualité".
"Il s’agit de changer concrètement la façon dont nous délivrons les soins. La logique de parcours coordonnés, l’exercice en équipe, le renforcement des liens entre les différents acteurs des prises en charge sont nécessaires", a-t-elle souligné.
"Cette transversalité, je sais qu’elle est enclenchée mais elle doit s’amplifier", a commenté la ministre, estimant que cela reposait sur "évolution des cultures professionnelles".
"Il faut aussi qu’on maintienne à domicile le plus longtemps possible les patients, et simplifier les parcours", a-t-elle ajouté. "Cela sera aussi facilité par les innovations technologiques et en particulier digitales, qui permettent de mieux partager les informations", mais cela "repose en premier lieu sur un renforcement et une modernisation des soins primaires et de proximité", a-t-elle ajouté.
Pour le troisième axe de la SNS, elle a estimé qu’il fallait "innover pour transformer notre système de santé, en s’appuyant sur les professionnels et en réaffirmant la place des usagers".
"Globalement robuste", notre système de santé "manque encore d’agilité et de souplesse pour s’accaparer les innovations et les intégrer dans le système de soins", a-t-elle expliqué.
"Cela nécessite de travailler sur les compétences métiers et sur le mode de gouvernance de l’innovation. Aujourd’hui, ce mode de gouvernance est très structuré. Les ARS [agences régionales de santé] ont à leur main certains budgets pour favoriser les innovations organisationnelles, pour favoriser les plateaux techniques... mais nous n’avons pas de vision globale de comment avance l’innovation dans notre pays et qui peut réellement en bénéficier et comment la développer", a-t-déploré.
"Ces innovations numériques, technologiques et organisationnelles en santé" constituent un enjeu clé pour "l’accélération du virage ambulatoire, la qualité du suivi des patients chroniques ou le partage de l’information par les acteurs du système de santé", a estimé Agnès Buzyn, précisant que les médecins devaient avoir un rôle dans l’évaluation de l’innovation.
"Je pense aussi que notre société attend une gouvernance renouvelée des politiques de santé, à la fois plus transversale, plus souple et plus lisible pour nos concitoyens", a-t-elle expliqué. "Je pense qu’il faut s’interroger sur une relation permanente avec les usagers pour leur implication dans l’évaluation de la qualité des soins pour nous faire changer nos pratiques et pour nous améliorer".
"D'autres pays l'ont fait. Le canada a mis en place la politique du patient partenaire. A Taïwan, les malades ont accès à leur dossier médical. Beaucoup de pays sont beaucoup plus en avance. C'est intéressant. Il faut ne pas en avoir peur. Il ne faut jamais avoir de la transparence et de la vérité. C'est un outil et une opportunité d'amélioration", a-t-ajouté.
En fin de discours, la ministre a indiqué que la SNS était en cours de concertation et que sa publication était prévue pour décembre 2017. En conférence de presse, elle a confirmé que le lancement de la concertation de la SNS se ferait courant septembre. "Cela sera public. Il y aura une forme de plan sur lequel je demanderai aux acteurs de travailler et le document définitif sera rendu public en décembre", a-t-elle précisé, "ee façon à ce que les ARS puissent le décliner en PRS (projet régional de santé) à partir de décembre ».
mh/eh/APMnews