STRASBOURG, 24 novembre 2008 (APM) - Des médecins de Bayonne décrivent deux cas de douleurs neuropathiques et d'hyperactivité musculaire qui semblent être associées à des huiles essentielles, dans un poster présenté au congrès de la Société française d'étude et de traitement de la douleur (SFTED) qui s'est déroulé en fin de semaine dernière à Strasbourg.
Le Dr Pierrette Caussade et ses collègues du CH Côte-basque à Bayonne rapportent le cas d'un couple qui a eu recours, à partir de septembre 2006, à des huiles essentielles de romarin et de lavande préparées au Maroc pour traiter une asthénie persistante.
A partir de début 2007, ces deux personnes ont développé des myoclonies et des fasciculations des membres inférieurs, rapportent les médecins dans le résumé de leur poster.
Le mari a interrompu ce traitement en août 2007 et a vu régresser ces troubles. En revanche, son épouse a continué à utiliser ces huiles essentielles, notamment en applications cutanées, quadruplant même la posologie malgré l'apparition de paresthésies à type de grouillements vermiculaires.
En janvier 2008, l'épouse a en outre développé une hyperactivité musculaire et des algies insomniantes qui se sont étendues secondairement aux membres supérieurs.
Le bilan neurologique était dénué d'anomalies anatomiques, électrophysiologiques ou inflammatoires; il n'y avait pas d'arguments en faveur d'une pathologie musculaire. Le diagnostic de syndrome des jambes sans repos a été évoqué et un traitement associant antalgique, antidépresseur, anticonvulsivant et myorelaxant mis en place mais sans succès.
L'hypothèse d'une neurotoxicité des huiles essentielles a donc été soulevée et ce traitement suspendu; en parallèle, les doses de clonazépam ont été réduites.
La symptomatologie a régressé rapidement et au contrôle du sixième mois, la patiente était toujours asymptomatique.
L'absence d'autre étiologie repérée et la disparition des signes à l'interruption de la consommation des huiles essentielles font fortement suspecter la responsabilité de ces substances, commentent les médecins.
Même si la toxicité chronique est peu documentée, les huiles essentielles de lavande et de romarin ont des effets potentiellement neurotoxiques: la fenchone et la pipéritone sont des substances dont le potentiel épileptogène et myélinotoxique a été mis en évidence; en outre, les terpènes sont connus pour favoriser la survenue de crises comitiales chez des patients prédisposés. Cette toxicité est cumulative, rapportent-ils.
Devant l'engouement envers les médecines naturelles et l'automédication croissante, en particulier via internet, le rôle potentiel d'huiles essentielles devrait être évoqué devant des cas inexpliqués de douleurs neuropathiques et d'hyperactivité musculaire et une épreuve de sevrage devrait être instamment requise, concluent les médecins.
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