WASHINGTON, 22 mai 2018 (APMnews) - La Food and Drug Administration (FDA) américaine a publié jeudi une liste des laboratoires pharmaceutiques qui, selon elle, pourraient bloquer de façon inappropriée l'accès à leurs médicaments aux Etats-Unis afin de retarder la concurrence générique.
Plusieurs des entreprises citées ont immédiatement protesté, affirmant que la liste n'était pas à jour et comprenait des médicaments pour lesquels des génériques sont en réalité disponibles.
Le document concerne la plupart des grands noms de l'industrie, dont Roche, Bayer, Mylan, AstraZeneca, Teva, Novartis, Shire, Boehringer Ingelheim, Gilead, Actelion, GlaxoSmithKline (GSK), Celgene, Lundbeck, Pfizer et Actelion (groupe Johnson & Johnson).
La publication de ces noms fait partie du plan présenté la semaine dernière par le président américain, Donald Trump, pour faire baisser les prix des médicaments aux Etats-Unis, notamment en renforçant la concurrence (cf
dépêche du 14/05/2018 à 09:27).
Le commissaire de la FDA, Scott Gottlieb, explique dans un communiqué qu'afin de développer et faire homologuer un générique d'un produit aux Etats-Unis, les génériqueurs doivent obtenir des échantillons des princeps auprès des laboratoires qui les commercialisent.
Ces laboratoires ont toutefois recours à des "tactiques" pour refuser l'accès aux échantillons, accuse-t-il.
La liste de la FDA rassemble les noms des produits pour lesquels une demande d'accès à des échantillons a été adressée à l'agence, signifiant que les génériqueurs n'ont pu les obtenir auprès des laboratoires princeps.
Plus de 150 demandes sont répertoriées pour une cinquantaine de médicaments.
Des génériqueurs ont par exemple contacté la FDA 31 fois au sujet de trois produits commercialisés par Celgene, dont 13 fois pour son principal médicament, le traitement du myélome multiple Revlimid* (lénalidomide).
Actelion est quant à lui associé à 26 demandes pour quatre médicaments, dont 14 pour Tracleer* (bosentan), indiqué dans l'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Onze demandes ont été transmises pour quatre médicaments de Novartis, et 11 autres pour des produits de Gilead, dont 10 au sujet de l'anti-HTAP Letairis* (ambrisentan).
Pas d'obstacle aux génériques malgré une distribution restreinte du princeps
"Nous pensons qu'une transparence renforcée aidera à diminuer des obstacles superflus dans le développement et l'homologation de génériques", commente la FDA.
Elle explique que beaucoup d'échantillons ne sont pas communiqués sous prétexte que les princeps visés font l'objet d'une distribution restreinte pour raisons de sécurité, notamment dans le cadre de plans de gestion des risques (PGR ou REMS en anglais).
"Je veux être très clair: une voie pour sécuriser des échantillons de médicaments princeps dans le but de développer des génériques devrait toujours être disponible", souligne Scott Gottlieb. "Même en cas de distribution restreinte comme avec un PGR, il devrait être possible de développer des génériques", ajoute-t-il.
"Beaucoup de princeps pour lesquels nous avons reçu une demande ne font pas l'objet d'un PGR. Cela suggère que les laboratoires princeps utilisent de façon inappropriée la réglementation en matière de distribution limitée pour entraver la concurrence", déclare-t-il également.
La FDA souligne que, lorsqu'elle reçoit une demande d'accès à des échantillons, elle informe l'autorité de la concurrence, la Federal Trade Commission (FTC), qui peut alors enquêter sur ces cas potentiels de pratiques anticoncurrentielles et prononcer des sanctions.
Opposition des industriels
Dans un communiqué, l'organisation professionnelle Pharmaceutical Research and Manufacturers of America (PhRMA) a estimé que la liste de la FDA était porteuse de plusieurs problèmes.
Pour le lobby industriel, "il est important de faire la différence entre ces produits pour lesquels la FDA a reçu des plaintes et ceux pour lesquels elle a reçu une demande de lettre de détermination de la sécurité". Ce document est émis par l'agence et assure aux laboratoires princeps que donner accès à des échantillons d'un médicament faisant l'objet d'un PGR est possible.
Celgene a fait valoir que trois de ses produits figurant sur la liste étaient associés à des risques importants d'effets secondaires, y compris des malformations congénitales graves.
"Ces thérapies sont soumises à des contrôles de sécurité rigoureux qui ont été mis en place par la société et approuvés par la FDA", déclare Celgene dans un communiqué. Il note que des génériques sont autorisés (mais pas encore commercialisés) pour deux des trois médicaments, notamment Revlimid*.
D'autres laboratoires ont déclaré que certains médicaments de la liste étaient déjà confrontés à la concurrence générique. Roche, qui est répertorié pour son anti-acnéique Accutane*/Roaccutane* (isotrétinoïne), a noté qu'il avait cessé de fabriquer ou de vendre son produit aux Etats-Unis en 2009.
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