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Covid-19: une 2e vague ne serait évitée qu'avec des mesures post-confinement strictes et prolongées (modélisation)

PARIS, 7 mai 2020 (APMnews) - Un 2e pic épidémique de Covid-19 en France apparaît inévitable après déconfinement, quelle que soit la durée du confinement, même avec masques obligatoires et distanciation sociale, à moins que les personnes vulnérables ne restent confinées pendant encore de longs mois, selon une étude de modélisation par des chercheurs français et américains.
Cette étude, mise en ligne mardi sur la plateforme de prépublication Medrxiv, n'a pas encore fait l'objet d'une validation par les pairs. Nicolas Hoertel de l'hôpital Corentin-Celton à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine, AP-HP) et de l'Inserm, et ses collègues, précisent que leur modélisation a aidé à établir la stratégie de lutte contre le Sars-CoV-2 en France.
Ils ont travaillé sur 3 durées de confinement (pas de confinement, 8 semaines et 16 semaines de confinement) et 3 scénarios de déconfinement (sans mesures d'accompagnement; avec masques et distanciation sociale; avec masques et distanciation sociale et confinement sélectif des personnes vulnérables), et ont estimé leur impact sur l'incidence du Covid-19, la mortalité et l'occupation des lits de réanimation.
Il apparaît selon leurs analyses qu'un 2e pic épidémique, avec une saturation des lits de réanimation, et donc une probable nouvelle période de confinement général, est quasi-inévitable, à plus ou moins long terme selon la durée du confinement, et que son ampleur sera peu affectée par les différentes mesures. En revanche la mortalité est clairement diminuée grâce au confinement.
Le seul scénario post-confinement permettant d'éviter une nouvelle saturation des lits de réanimation consiste, après la levée du confinement général qui aura duré 8 semaines (soit le 11 mai comme il est prévu à ce jour), à accompagner ce déconfinement non seulement du maintien de la distanciation sociale et du port du masque, mais aussi du maintien du confinement des personnes vulnérables jusqu'à la fin estimée de l'épidémie (fin février 2021), soit pendant 38 semaines.
Le maintien du confinement ciblé vers les personnes vulnérables implique que ces personnes restent chez elles (sauf pour leurs courses de première nécessité), qu'elles puissent rester avec les membres de leur famille vivant chez elles sans mesures de protection particulières, qu'elles ne puissent participer à des réunions amicales ou familiales avec des membres vivant en dehors de leur foyer, et qu'elles évitent strictement tout contact avec des personnes symptomatiques.
Si ce confinement n'est maintenu que 16 semaines pour les personnes vulnérables, après la levée du confinement général, le taux d'occupation des lits de réanimation n'atteindrait pas tout à fait la capacité maximale mais il y aurait de nouveau une forte tension.

Un nouveau pic fin août-début septembre avec masques et distanciation sociale

Selon les modélisations des chercheurs, le déconfinement après 8 semaines, sans aucune mesure d'accompagnement, entraînerait un pic épidémique à son paroxysme début juin, avec des besoins en réanimation largement au-delà de la capacité maximale.
Graphes issus de la publication de Nicolas Hoertel et al.
Graphes issus de la publication de Nicolas Hoertel et al.
En accompagnant le déconfinement seulement du respect de la distanciation sociale, le pic serait légèrement diminué, et décalé de 1 ou 2 semaines, et les besoins en réanimation au-delà des capacités maximales. La mortalité cumulée serait toutefois diminuée de 20% (figures ci-contre).
En y ajoutant le port du masque obligatoire, la mortalité serait cette fois diminuée de 40% supplémentaires (de 60% par rapport à l'absence de mesures de protection post-confinement), et le pic épidémique bien raboté, décalé à fin août-début septembre, avec des besoins en réanimation restant légèrement supérieurs à la capacité maximale.
Les scénarios les plus optimistes sont ceux ajoutant le maintien du confinement des personnes vulnérables après le 11 mai, au maintien général des mesures barrières (masques et distanciation sociale). Si les personnes vulnérables restent confinées pendant 16 semaines, la mortalité baisse encore de 12%, le pic est décalé à début octobre, et les besoins en réanimation sont inférieurs à la capacité maximale, mais maintiennent la tension en étant supérieurs à la capacité normale.
Avec un maintien du confinement des personnes vulnérables pendant 38 semaines, en plus des mesures barrières, les courbes sont très aplaties, la mortalité diminue de 62% par rapport aux seules mesures de distanciation sociale et port du masque, et de 85% par rapport à l'absence de mesures de protection post-confinement, et les besoins en réanimation sont très en dessous des capacités habituelles (figures ci-contre).
Mais selon les chercheurs, si seulement la moitié des personnes vulnérables adhèrent aux mesures de confinement ciblé, un 2e pic épidémique ne pourra être évité, entraînant une nouvelle période probable de confinement général.
"Une fois qu'une majorité de la population à bas risque aura été immunisée contre le Covid-19, l'effet d'immunité de groupe empêchera probablement que les personnes vulnérables soient infectées. Comme les mesures de protection seront utilisées par l'ensemble de la population pour aplatir le rebond épidémique, l'effet d'immunité de groupe, possiblement associé à l'extinction progressive de l'épidémie, ne serait atteint que 38 semaines après la levée du confinement, c'est-à-dire fin février 2021", estiment les auteurs.
cd/nc/APMnews

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