PARIS, 28 mars 2022 (APMnews) - Le gouvernement est revenu sur sa décision d'accorder une subvention de 800.000 euros au groupe Servier pour un projet d'augmentation des capacités de production pharmaceutique de son site de Gidy (Loiret) après avoir été interpellé par les membres d'un collectif de victimes de Mediator* (benfluorex), a partagé samedi le ministère chargé de l'industrie à APMnews.
"Compte tenu de l'émotion suscitée par cette décision, le gouvernement a décidé d'annuler cette subvention qui concerne le site de Gidy, anciennement site de production du Mediator*", a signalé le ministère.
Cette aide publique accordée via un appel à projets du Plan France relance a fait polémique après que Le Canard enchaîné a révélé mercredi qu'elle profiterait à la production de médicaments jugés inefficaces ou dangereux par les autorités sanitaires, comme le traitement de l'angine de poitrine Vastarel* (trimétazidine) et l'anti-hypertenseur Triplixam* (périndopril + indapamide + amlodipine) (cf
dépêche du 24/03/2022 à 11:08).
Réagissant à la diffusion de cet article, Bercy avait d'abord assuré avoir procédé à des vérifications et souligné le fait que les "trois quarts des volumes" de production du site concernaient bien des médicaments s'étant vu reconnaître un service médical rendu (SMR) important de la commission de la transparence (CT) de la Haute autorité de santé (HAS) (cf
dépêche du 25/03/2022 à 15:15).
C'est finalement la réaction des membres du collectif de victimes de Mediator* qui a conduit l'exécutif à faire machine arrière, selon un lettre qui lui a été adressé, dont APMnews a eu copie, signée par la ministre chargée de l'industrie, Agnès Pannier-Runacher, et datée de samedi.
La ministre y rappelle que les aides publiques accordées dans le cadre du plan de relance économique visent à "rattraper le sous-investissement, voire le désinvestissement, dans certaines industries de santé", en soutenant des projets "portés par les industriels déjà présents en France pour l'essentiel", et que le projet de Servier s'inscrivait bien dans cette démarche.
Toutefois, "vous nous faites part de votre vive émotion concernant l'octroi de cette subvention au site de Gidy où, historiquement, s'est déroulée la production du Mediator* -produit qui fait encore l'objet de procédures judiciaires", a-t-elle poursuivi, mentionnant un courrier adressé le 8 mars par le collectif de victimes au ministre de l'économie, des finances et de la relance, Bruno Le Maire.
"Aussi, compte tenu de cette émotion que nous entendons, et dans un esprit d'apaisement, je tenais à vous informer que nous avons décidé d'annuler cette subvention au bénéfice du site de Gidy", a partagé la ministre.
Le projet de Servier à Gidy représente un investissement total de 16 millions d'euros et consiste à faire passer les capacités de production du site de 214 millions de boîtes de médicaments à 300 millions en 2025, rappelle-t-on.
Pour rappel, le groupe français ainsi que son ancien n°2, Jean-Philippe Seta, ont fait appel de leurs condamnations pour les délits de tromperie aggravée et d'homicides et blessures involontaires dans l'affaire Mediator* prononcées en mars 2021 par le tribunal judiciaire de Paris (cf
dépêche du 08/04/2021 à 12:06 et
dépêche du 29/03/2021 à 17:57).
rm/eh/APMnews